Connu pour ses rigidités et son manque de flexibilité, le Code du travail nécessitait d’être plus adapté à la pratique, notamment pour les entreprises innovantes et les startups.
Suite à la Loi Travail proposée par Myriam El Khomri et adoptée l’an dernier, l’une des priorités du Président Emmanuel Macron est de soutenir les jeunes pousses dans leur projet. Une réforme du droit du travail sera ainsi votée au Parlement par ordonnance cet été.
Quels changements cette réforme implique-t-elle pour les startups ?
Plusieurs mesures de cette réforme sont susceptibles d’intéresser les startups et ainsi de simplifier la vie de leurs dirigeants. C’est le cas notamment de la redéfinition du licenciement économique, du plafonnement des indemnités prudhommales, de la possibilité de passer au forfait-jour etc. D’autres, au contraire, ne les concernent pas voire leur sont préjudiciables.
La réforme du code du travail vise avant tout à flexibiliser le droit du travail. Quatre champs que nous détaillons dans cet article concernent tout particulièrement les startups.
1. La primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche
La mesure phare de cette réforme tient à la primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche pour ce qui concerne le temps de travail. Cette mesure s’étendra probablement à d’autres domaines comme les salaires, les conditions de travail, la formation etc. suite au projet du Président Emmanuel Macron.
Ainsi, une entreprise, en accord avec les délégués syndicaux, peut faire travailler davantage ses salariés, même si l’accord de branche prévoit un volume horaire plus faible. Cependant, cette loi n’autorise pas les employeurs à négocier directement avec leurs salariés.
Que faire alors lorsque les entreprises, particulièrement les startups, ne possèdent pas de représentant syndical ?
Des alternatives existent pour répondre à ce problème : l’employeur peut négocier avec des salariés ou des élus mandatés. Mais, ces démarches sont assez pénibles pour ces petites structures où le dialogue entre employé et employeur se doit d’être rapide.
Autoriser une entreprise à déroger à la loi par accord d’entreprise, avantage donc les entreprises qui ont une taille suffisante pour avoir des représentants du personnel. Toute inversion de la hiérarchie des normes est inopérante pour les autres.
2. Un élargissement des exceptions à la durée maximale de travail quotidien
L’allongement de la durée maximale quotidienne de travail des salariés était une des demandes principales des entreprises innovantes. En effet, dans ces secteurs, la création de valeur n’est pas liée au temps de travail.
Leur demande fut entendue puisque la réforme assouplie la législation sur la durée de travail quotidienne. Initialement de dix heures, elle peut, par accord d’entreprise, passer à douze heures en cas d’intense activité ou pour des motifs liés à l’organisation de l’entreprise.
L’entreprise peut également baisser la majoration de salaire des heures supplémentaires à 10 % (à défaut d’accord, le taux légal de majoration est fixé à 25 % pour les huit premières heures supplémentaires travaillées dans la même semaine et à 50 % pour les heures suivantes).
Enfin, la Loi opère une simplification du recours au forfait jours dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Ce dispositif, favorisant une flexibilité du temps de travail, doit être signé par un accord d’entreprise. Ainsi, s’agissant d’une startup, celle-ci doit obligatoirement faire appel à un salarié mandaté.
3. Une redéfinition du licenciement économique
Les startups sont connues pour leur prise de risque. Cela explique que bon nombre de ces entreprises connaissent des moments difficiles qui les obligent à licencier du jour au lendemain afin de sauver leur structure et réembaucher quelques mois plus tard.
En raison du peu de flexibilité du droit social, ces startups ont souvent recours à des pratiques déplorables pour inciter leurs salariés à démissionner.
La Loi travail, à son article 67, a opéré une réforme du motif économique. Sont intégrés dans le texte les motifs jurisprudentiels que sont la réorganisation de l’entreprise et la cessation d’activité. Elle précise également le terme « difficulté économique » qui s’apparente à une modification significative d’au moins un indice économique (tel que la baisse de commande, la baisse du chiffre d’affaire ou la dégradation de la trésorerie) lorsque la durée de la baisse, en comparaison avec la même période de l’année dernière, est au moins égale à :
- 1 trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;
- 2 trimestres pour une entreprise de 11 à 50 salarié ;
- 3 trimestres pour une entreprise 50 à 300 salariés.
Ainsi, une baisse d’un de ces indices pendant plusieurs trimestres consécutifs est susceptible de justifier un licenciement économique, ce qui est favorable aux startups qui subissent une baisse d’activité.
4. Un plafonnement des indemnités prudhommales
Pour recréer de l’emploi et tenter de faire baisser le taux de chômage en France, la loi facilite les ruptures de contrat en assouplissant les règles du CDI (contrat à durée indéterminé). Les employeurs, notamment ceux de startups, gagneraient ainsi en flexibilité.
Ils pourraient également réduire le coût du travail notamment grâce à la simplification de la rupture du contrat de travail par une entreprise. En effet, la Loi Travail propose une baisse du barème des indemnités prud’homales en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cela rendrait la rupture du contrat de travail moins contraignante pour l’employeur.
Enfin, la loi prévoit aussi un assouplissement du recours au CDD (motif, durée, renouvellement etc).
En définitive, cette réforme parait être de bon augure pour les startups. Cependant, elle risque d’être dûment contestée par les syndicats qui y voient une atteinte aux droits des salariés. Les négociations entre les partenaires sociaux et le gouvernement ont commencé le 9 juin 2017 et devraient se terminer le 21 juillet 2017…
Cet article a été rédigé par Elsa Trombitas de Alto Avocats, cabinet spécialité dans le droit des startups.